Depuis 2016, le Burkina Faso, à l’instar de beaucoup de pays de la zone sahélienne, vit une véritable crise sécuritaire. 2019 a vu se greffer une crise sanitaire, celle liée à la COVID-19. Notre système éducatif se trouve profondément affecté et risque à long terme d’impacter négativement le processus de renouvellement des acteurs sociaux dans nombreuses régions. Face à cette situation, le système éducatif s’est voulu résilient en utilisant une approche nouvelle, déjà utilisée sous d’autres cieux et une alternative pédagogique en cours d’expérimentation. Celle-ci nécessite beaucoup d’investissements en termes de ressources et d’efforts.
De l’approche. Tout système éducatif s’exprime aux apprenants à travers les curricula. Ils sont un ensemble ordonné de contenus que doivent acquérir les apprenants à travers le déroulement des activités d’enseignement-apprentissage. La crise sécuritaire impactant négativement le système éducatif réduit profondément le temps scolaire à travers les fermetures intempestives, si ce n’est la destruction pure et simple des infrastructures. Pour parer à cet impératif temps, le MENAPLN a produit à travers la DGREIP (Direction Générale de la Recherche en Education et de l’Innovation Pédagogique), la DGEPFIC (Direction Générale de l’Encadrement Pédagogique et le Formation Initiale et Continue) et le ST-ESU (Secrétariat Technique de l’Education en Situation d’Urgence) des curricula qui prennent en compte l’impératif temps : ce sont les curricula de l’Education en Situation d’Urgence (ESU). Ils peuvent être exploités en 4 ou 5 mois. Mieux après normalisation de la situation sécuritaire, ils peuvent faciliter le rattrapage de deux années scolaires en 12 mois avec des vacances de 2 mois. Ce sont des outils pertinents construits sur la base des curricula traditionnels normaux existants, ceux de 2010. Ils couvrent tous les cycles : primaire, post primaire et secondaire. Ainsi se décline la nouvelle approche. L’approche par les curricula de l’ESU. Ils ont été utilisés en SIERRA LEONE, au LIBERIA, en HAITI en BOSNIE-HERZEGOVINE ex-Yougoslavie.
De l’alternative pédagogique. Elle répond à la vérité qu’enseigner et apprendre aujourd’hui dans les zones à forts défis sécuritaires au Burkina Faso devient périlleux. Il devient de plus en plus difficile de réaliser l’enseignement-apprentissage à travers le triptyque, un maitre, une classe et un tableau. L’alternative pédagogique s’appuie sur le numérique sans ou en présentiel : la e-class.
Pour engager cette alternative, les acteurs du système éducatif ont produit des ressources pédagogiques numérisées à partir des curricula de l’ESU. Celles-ci sont disponibilisées sur une plate-forme appelée Faso éducation. Ainsi avec un réseau intra ou internet, des ordinateurs, tablettes et autres smartphones, androïdes, iPhone et un techno-pédagogue les élèves apprennent sans risque de chez eux ou dans des centres d’apprentissage temporaire sécurisés. Les ressources peuvent être directement installées sur ces outils. L’enseignant organise toutes ses séances d’enseignement-apprentissage, ses évaluations corrections sans difficultés. Comment réunir les conditions d’une e-class ?
L’introduction des Tics dans le système éducatif burkinabè a été prise en compte dans la réforme curriculaire en cours. Cette initiation débute au primaire pour se poursuivre durant le post-primaire et le secondaire. La maitrise des tics est alors un préalable incontournable. La production des ressources pédagogiques numérisées répond à cet objectif d’amélioration de l’efficacité et de l’accessibilité de notre école pour l’avenir. L’une des interrogations les plus récurrentes, c’est l’accessibilité par la plus grande majorité à cet enseignement novateur. Pour faciliter cet accès, l’Etat et ses partenaires techniques et financiers endossent ce volet de même que les collectivités locales par leurs relations de parrainage. Au-delà, se posent des questions à trois niveaux :
- La disponibilité de l’énergie pour alimenter le dispositif local dans les zones rurales : étant un pays de soleil, cette question est réglée par le solaire. C’est l’énergie propre à privilégier.
- Le matériel informatique. C’est l’élément essentiel. Pour régler cette question, le MENAPLN s’appuiera sur les salles informatiques existantes, le matériel à acquérir (ordinateurs, tablettes éducatives et autres terminaux, bornes pour réseaux internes) doit provenir de financements divers (budget national, partenaires du cluster national éducation, collectivités locales…).
- La connexion internet dans les zones rurales : elle sera résolue par les réseaux locaux et l’intranet.
Les ressources pédagogiques numérisées peuvent directement implémentées sur les appareils des élèves. De nos jours, partout au Burkina Faso l’utilisation des terminaux est répandue. Une aubaine à saisir. L’éducation est devenue un mal dont il faut guérir. n
Passée cette crise, le système éducatif sera-t-il encore le même. Pourra-t-il résister au numérique, à l’avènement des e-class ? c’est le nouveau défi de l’école burkinabè : cher mais incontournable. Il faut venir à son secours. L’éducation est devenue comme un mal dont il faut guérir, c’est-à-dire, créer et entretenir les conditions de son expression. A la suite du Professeur KI-ZERBO Joseph, nous dirons, innover dans nos méthodes d’enseignement-apprentissage ou disparaitre. Des pays comme le Rwanda, le Ghana le réalise, pourquoi pas nous ? Sommes-nous moins ambitieux ?
Démajean Hamidou NAO
Encadreur Pédagogique d’Histoire Géographie
Point focal ESU DREF/DGREIP
Collaborateur Externe CERFODES