L’évaluation à mi parcours a été conduite par le CERFODES, et a été réalisée sur la période allant d’avril à mai 2019 sur huit des neuf provinces de la zone d’intervention du projet. En effet, pour des raisons sécuritaires, la province de la Kompienga n’a pas été couverte par l’évaluation. A travers des enquêtes quantitatives et qualitatives, l’évaluation a permis d’interroger les producteurs de sésame, les responsables de coopératives et unions, les structures partenaires privées et étatiques.
Sur la base d’un échantillon représentatif de 840 producteurs échantillonnés aléatoire sur la base de la liste des producteurs bénéficiaires, les résultats obtenus permettent d’apprécier le niveau de résultats actuels atteints par le projet, par rapport à ce qui a été initialement planifié. Conformément aux TDR, Les résultats sont analysés, à travers les critères d’évaluation que sont la pertinence, l’efficacité, l’efficience, l’impact et la durabilité des acquis du projet.
Analyse et Résultats
Projet sésame
Sur le plan de la pertinence du projet et tenant compte du contexte économique et des priorités du pays, des besoins des producteurs de la filière sésame, l’évaluation du projet sésame montre que les interventions du projet sésame viennent en appui au Gouvernement du Burkina Faso, à travers le ministère de l’agriculture et des aménagements hydro-agricoles (MAAHA) et du ministère de l’Industrie, du commerce et de l’artisanat (MICA). Le projet Sésame a joué un rôle important dans la classification et fixation des prix planchers permettant d’informer tous les acteurs de la filière Sésame sur les types de sésame, leur qualité et leurs prix afférents au cours de la campagne agricole en cours. Le projet est aussi en parfaite adéquation avec l’adoption du Plan national de développement économique et social (PNDES) pour la période 2016-2020. Au regard des objectifs du projet sésame, on note qu’ils sont aussi en concordance avec des projets similaires comme le Projet de renforcement des capacités productives et commerciales de la filière sésame avec la coopération allemande GIZ de la période 2012-2017. Le Projet de renforcement de la production de sésame au Burkina Faso de la Coopération japonaise (JICA-PRPS, 2014-2019) et le projet sésame de la Fondation SEMAFO, mis en œuvre depuis 2016.
Pour ce qui est de l’efficacité du projet, elle est appréciée à travers la gestion du projet et l’efficacité du programme à travers les résultats atteints par rapport aux prévisions initiales du projet.
Pour l’efficacité de la gestion du projet, LWR a mis en place une équipe centrale et régionale en charge de l’effectivité des activités du projet sur le terrain conformément aux prévisions. La mise en place complète de l’équipe a connu des retards, avec des arrivées et des départs du personnel qui ont affecté la mise en œuvre effective du projet. Par ailleurs sur le plan de l’efficacité de la gestion, le projet SESAME a été flexible en intégrant de grands changements dans sa stratégie de mise en œuvre.
Pour les superficies de terres cultivées utilisant six techniques ou technologies, il a été procédé d’abord à l’évaluation de la superficie moyenne en hectares consacrée à la production de sésame chez les producteurs utilisant au moins six techniques ou technologies. Ainsi la superficie moyenne de terres emblavées par les producteurs bénéficiaires du projet, utilisant au moins six techniques ou technologies, est de 2.01 hectares. Ce qui est relativement identique aux superficies relevées lors de l’étude de base qui étaient de pour l’ensemble de 2 ha. Suivant le genre, il existe une nette différence entre la surface moyenne chez les hommes (2,43) et les femmes (1.09 ha). L’accès à la terre demeure encore l’apanage des hommes plus que des femmes. Aussi quel que soit le genre (homme et femme) la surface moyenne emblavée par le producteur adulte utilisant au moins six (6) techniques ou technologies est légèrement supérieure à celle du producteur jeune.L’estimation de la superficie totale par extrapolation de la superficie moyenne au nombre total de cette catégorie de producteurs donne une valeur de 12337,38 ha. La comparaison avec la prévision de l’année 2018 (64 350 ha) permet de dire qu’environ 20% de la prévision est effectivement atteinte. Il est sous entendu qu’avant l’intervention du projet, les producteurs utilisaient peu ou pas de techniques ou technologies améliorées. Par conséquent les résultats obtenus sont dues à de l’intervention du projet SESAME. Ce qui est relativement faible en terme de niveau d’atteinte des résultats Nous avons considéré également les mesures objectives du projet, réalisées par le biais des PEAS dans l’estimation totale des superficies emblavées. Selon ces données, le cumul des terres emblavées sous techniques ou technologies depuis le début de la mise en œuvre du projet il est de 3 0962,1 ha. Lorsque ce cumul est rapporté à la cible à terme du projet (163 799 ha) cela donne un pourcentage de 18,9%, pourcentage qui du reste est comparable au niveau d’achèvement de la prévision de 2018. Partant de ces réalités, la question judicieuse que l’on se pose est de savoir si les prévisions aussi bien de 2018 que de l’ensemble de la durée du projet sont vraiment réalistes. Pour l’indicateur (standard 14) sur le volume des marchandises vendues par les bénéficiaires, cet indicateur a été considéré comme étant la somme des volumes de sésame vendus par les Unions et les agriculteurs directement. Pour la mesure de cet indicateur au cours de l’EMP, il a été procédé à l’évaluation du volume moyen de sésame vendu par chaque producteur bénéficiaire du projet. La désagrégation par sexe et par tranche d’âge des producteurs montre que le volume moyen de sésame vendu par un producteur homme et adulte est relativement supérieur à celui d’un producteur homme et jeune. Cette différence est d’environ 65 Kg (0,4221 tonne pour les adultes contre 0,4157 pour les jeunes).Chez les femmes, c’est le contraire qui est observé, car le volume moyen de sésame vendu par une productrice adulte (0,2911 tonne) est en moyenne inférieur de 80 Kg à celui d’une jeune productrice (0,3787 tonne).Pour ce qui est du volume total de vente, l’extrapolation du volume moyen (0,433 tonne) au nombre total de bénéficiaires du projet en septembre 2018 (31078) donne une valeur globale de 13 472,234 tonnes. Cela montre que le projet SESAME a eu un impact réel sur le volume de vente de sésame dans ses zones d’intervention. Ce volume représente environ 6% de la cible à atteindre à la fin du cycle du projet qui est de 228 528 tonnes. Si le niveau de croissance actuel du volume de sésame vendu (x 4 à mi-parcours) est maintenu, il est évident que la cible ci dessus ne sera pas atteinte. Il serait donc souhaitable de revisiter les bases de la fixation de cette cible et de la revoir à la baisse car malgré les progrès substantiels de volume de vente par les bénéficiaires du projet, cette cible semble trop ambitieuse et pratiquement inachevable par le projet d’ici sa fin. L’indicateur (standard 13) sur les valeurs de ventes de sésame vendues par bénéficiaires est la somme des ventes à bord champs et des ventes de l’union au cours de la période de déclaration. Partant du nombre total de bénéficiaires du projet en septembre 2018 qui était de 31078, le montant total des ventes de sésame extrapolé sur la base de 250 471 FCFA/producteur est de 7 784 137 738 FCFA soit USD14 152 978. Ce montant multiplie par cinq (5) environ le montant des ventes estimées à l’évaluation de base. Toutefois, il reste très loin de la cible à terme du projet dont il ne représente qu’à peine 8%. Cette cible étant étroitement liée à celle sur le volume de sésame vendu, elle apparait également très ambitieuse et nécessite par conséquent une révision à la baisse. La nouvelle cible devrait être fixée en tenant compte des progrès réels réalisées au cours des deux premières années de mise en œuvre du projet par rapport à la valeur de référence contenue dans l’évaluation de base.
Pour ce qui est de l’efficience du projet, on note que le bilan Le bilan financier indique que sur un budget prévisionnel de 15 369 832 USD, le montant décaissé est évalué à la date du 28 février 2019 à 4 322 600 USD soit un taux de réalisation financière de 28%. Le bilan financier permet de dire que le projet a connu un ralentissement dans son exécution. Les facteurs qui ont atténué les résultats physiques sont, entre autres les activités du projet qui ne sont mises en œuvre que pendant la campagne de récolte et de commercialisation du sésame et qui ne durent que 03 mois maximum par an. Il s’ensuit un faible suivi des activités par les PEA sur le terrain. Les alternatives ou ajustements qui pourraient conduire à de meilleurs résultats sont, entre autres: la réduction des retards dans la validation des plans de travail annuels y compris les plans de passation des marchés, la clarification, à travers des conventions, des rôles et tâches des agents de l’agriculture impliqués dans la mise en œuvre du projet. L’accompagnement des producteurs dans les négociations pour leur accès aux crédits nécessite de restructurer le dispositif d’accompagnement des producteurs pour l’accès aux crédits auprès des banques et autres institutions financières parce que les acteurs de la filière ont un faible accès au financement.
L’impact du projet, est évalué avec les changements opérés par le projet chez les bénéficiaires au stade actuel de sa mise en œuvre. Pour parvenir aux changements souhaités, sept (07) activités de développement agricole, en coordination avec le secteur privé, le Ministère de l'Agriculture et le Ministère de l'Industrie et du Commerce ont été identifiées pour être menées. La réalisation des différentes activités planifiées a permis que des changements puissent s’opérer chez les bénéficiaires. Les différents changements observés sont que : les capacités des bénéficiaires ont été renforcées à travers des formations fournies par le projet aux producteurs sur les technologies et techniques de la production, et de la post production. L’accès des bénéficiaires aux marchés s’est amélioré avec une plate-forme d'information sur le marché qui a été mise en place. Il s’agit de SimAgri qui est désormais remplacé par N’Kalo sur la plateforme 321 sur le réseau téléphonique Orange et sur VIAMO. Des liens avec d’autres plateformes d'informations sur les marchés en ligne ont été réalisés afin de s’assurer que les vendeurs et les acheteurs ont des informations en temps réel pour les utiliser pour leurs négociations. Des partenariats ont été établis avec les acteurs de la filière, dont les ministères de l’agriculture, du commerce, des acteurs du secteur privé et. Les partenariats s visent à permettre aux acteurs, qui la réalisation et la coordination des activités, qui le suivi-évaluation et le contrôle qualité des produits. Pour ce qui est de la durabilité du projet, il est très tôt à cette étape d’en examiner. A l’étape actuelle de l’évaluation, le projet doit envisager la mise en place et la consolidation des activités et du partenariat inscrit. Toutefois, on peut noter que l’accompagnement des groupements de producteurs vers des coopératives et l’acquisition des crédits auprès des institutions financières laisse prévoir la mise en place d’organisations paysannes pérennes. Quelques leçons apprises de la mise en œuvre actuelle du projet sont relevées à la suite de l’analyse des critères de performances du projet. Parmi les leçons importantes apprises, on peut citer :
– la mise en œuvre du projet a été un apport considérable pour les producteurs ainsi en contribuant à l’amélioration des conditions de commercialisation en leurs faveurs à travers les ventes groupés ;
– l’accompagnement des organisations paysannes par des structures étatiques à se conformer à la loi OHADA En effet l’accompagnement des groupements pour la conformité avec la loi OHADA est très bénéfique pour les groupements en se sens que cela leurs permet de garantir leur biens et matériels ; d’avoir un statut juridique et de pouvoir mener leur activité en toute conformité avec les textes existants en la matière. Cela facilite l’accès aux prêts auprès des institutions financières ;
– le suivi électronique des activités des PEA par un cadre de performance ne remplace pas totalement le suivi physique des activités sur le terrain. Il est nécessaire d’avoir également un suivi présentiel des CFA ou des chargés de projet ;
– la plupart des producteurs du sésame ont à leur possession du matériel comme le tamis pour rendre leur sésame plus propre lors des ventes groupées ;
– l’accès à l’information sur les marchés nationaux du sésame à travers la plateforme N’Kalo sur 321 sur le réseau orange est un outil viable même après la fin du projet. Aussi cet outil peut participer à une meilleure visibilité du projet auprès de ceux qui l’utilisent pour avoir des informations sur le marché du sésame. L’évaluation aboutit à la conclusion que le Projet Sésame est un projet pertinent pour la filière sésame au Burkina Faso. Il répond aux besoins économiques du. Le projet SESAME est efficace car il a su s’adapter à certaines contingences du pays et des producteurs en montrant de la flexibilité dans sa gestion. C’est le cas de l’accompagnement des organisations paysannes pour leur conformité à la loi OHADA, alors que ceci n’était pas inscrit dans ses activités. Le projet a également réussi à intégrer des changements dans sa stratégie de mise en œuvre tels le remplacement de Simagri par le service N’kalo qui accroit ainsi l’accès des bénéficiaires aux marchés à tout moment. C’est un instrument qui est durable même après la fin du projet au regard de l’engouement que les bénéficiaires manifestent pour son utilisation quand bien même l’accès au service est payant.
Pour ce qui est des indicateurs du programme, le projet a défini des cibles à atteindre qui sont très ambitieuses, mitigeant ainsi les acquis réels obtenus par le projet. Cela demande donc que LWR et USDA revoient de nombreuses cibles à atteindre à la baisse. Cette requête est valablement soutenue par la réalité actuelle du Burkina Faso avec l’insécurité qui affecte le pays, dont les zones d’intervention du projet à l’Est et dans la Boucle du Mouhoun, empêchant le projet d’intervenir efficacement sur le terrain. Aussi, le retard observé par le projet dans sa mise en œuvre nécessitera de rallonger de six mois au moins le projet. En tout état de causes des recommandations sont faites pour réajuster ou réorienter le projet sésame pour le reste de la durée de vie du projet. Face à tous les défis relevés au cours de cette évaluation, les évaluateurs font des recommandations au Projet SESAME.
Recommandations
-Ajustement de la pertinence du projet au contexte actuel du pays
– Redimensionner/réduire le champ d’intervention au regard de l’insécurité qui ne permet d’accéder à certaines localités de l’Est et de la Boucle du Mouhoun.
Efficacité pour un meilleur suivi/Evaluation du projet
– Rediscuter avec LWR sur la réduction du nombre des bénéficiaires (directs et indirects) du Projet pour le rendre réaliste et réalisable. L’indicateur 17 porte sur 90466 bénéficiaires directs et l’indicateur 18 sur plus de 415 000 bénéficiaires indirects restent très élevés, si l’on note qu’à moins de deux ans et demi de la fin du projet, seulement un peu moins du tiers des bénéficiaires (31078) ont été touchés..
– Revoir le PMP et intégrer des indicateurs de mesure de progrès comme le calcul du rendement moyen à l’hectare. Cet indicateur est très important dans l’appréciation de l’évolution d’une intervention sur l’amélioration de la productivité.
– Abandonner l’indicateur standard 3 sur le nombre total de bénéficiaires qui appliquent la ou les connaissances reçues dans la gestion agricole. L’indicateur n’est pas adéquat à la majorité des producteurs actuels au Burkina au regard de variables à prendre en compte comme l’utilisation de l’informatique et des GPS.
– Procéder au recrutement de chargés de projet supplémentaires pour un meilleur suivi des activités du projet sur le terrain.
– Encourager également NITIDAE à recruter trois autres CFA supplémentaires pour un meilleur encadrement des activités de formation et de démonstration des PEA ?
– Recruter un spécialiste avisé des questions du Commerce international en lien avec la chaine de valeur Sésame au regard du volet sur le commerce international qui est une composante clé du projet.
– Réduire le ratio de producteurs par PEA pour le situer à 100 au maximum. Cela aura
l’avantage de leur permettre d’être plus efficace dans le travail de formation et
d’encadrement des autres producteurs.
Impact accru de la mise en œuvre
– Intégrer l’INTERSEB comme partenaire de mise en œuvre du projet en lui confiant la
partie sur le plaidoyer.
– Echanger avec les unions et convenir de la construction d’aires d’entreposage protégées moins onéreuses que les magasins de stockage de sésame afin de mieux répondre aux nombreux besoins des producteurs de disposer de lieux stockage adéquats qui améliorent et garantissent la qualité du sésame vendu.
– Convenir avec les unions pour la construction d’aires d’entreposage protégées moins onéreuses que les magasins de stockage de sésame pour répondre aux nombreux besoins des producteurs de disposer de lieux stockage adéquats.
Efficience dans la gestion financière et programmatique
– Allègement des procédures pour faciliter les décaissements pour la conduite des activités. Au regard des retards observés, et vue l’urgence d’engager les activités et les partenariats rehausser le taux pour l’approbation du COP de l’ordre de 3000 USD pour le faire passer à 30000 USD.
– Valider à temps, des plans de travail annuels et des plans de passations des marchés qui sont des préalables aux décaissements pour le financement des activités pour accroitre le niveau des décaissements que de la mise en œuvre des activités.
Durabilité par les acquis du projet et le partenariat
– Maintenir et Vulgariser sur l’ensemble des réseaux téléphoniques du Burkina Faso la plateforme d’information 321 sur les marchés par l’établissement de liens avec d’autres plateformes d'information sur les marchés afin de s’assurer que les vendeurs et les acheteurs ont des informations en temps réel pour leurs négociations ;
– Maintenir l’accompagnement des groupements vers des sociétés coopératives en conformité avec la loi OHADA afin de les rendre pérenne la structuration de la Commercialisation par la vente groupée du sésame
– Elargir l’accès des producteurs aux services financiers et non financiers avec le le partenariat public-privé en renforçant les compétences des acteurs de la filière sésame pour qu’ils aillent chercher des financements avec des investisseurs potentiels, nationaux ou internationaux, pour l’amélioration de la production et de la productivité que l’amélioration des circuits de commercialisation.